Lutter contre les changements climatiques dans les déplacements domicile-travail

Oct 3, 2023

J’ai grandi au Nouveau-Brunswick, et quand j’étais jeune, mes parents et leur voiture étaient mon principal moyen de transport dans ma ville. Enfant, je prenais l’autobus pour aller à l’école et je me déplaçais à vélo dans mon quartier, mais au-delà de cette petite bulle, ma mobilité dépendait de l’accès à une voiture. Les quelques balades à vélo à travers la ville jusqu’à la maison de mes grands-parents ou vers les célébrations de la fête du Canada étaient de grandes occasions dont je garde un excellent souvenir.

À l’adolescence, rien n’était plus important pour moi que d’obtenir mon permis de conduire pour pouvoir enfin me déplacer et quand je le voulais. Quand c’est arrivé (avec tous les coûts qui viennent avec), j’ai commencé à prendre la voiture pour aller à l’école et au travail et manger dans des restaurants fast food chaque fois que j’en avais envie. Ce que je n’avais pas encore réalisé, et que j’allais apprendre à l’âge adulte, c’est que mon incapacité à me déplacer sans voiture était un symptôme du milieu bâti dans lequel j’ai grandi.   

Les trajets que je voulais faire auraient été, pour la plupart, tout à fait possibles à vélo. Or, ils n’étaient pas conçus pour ce mode de transport. Quand j’avais envie d’aller quelque part en vélo, mes parents me rappelaient constamment que ce n’était pas sécuritaire (ils le font toujours!). Je n’ai jamais vraiment vu quelqu’un se servir du vélo comme un vrai moyen de transport, alors je n’avais pas envisagé que ce puisse être une option. C’est grosso modo ce qu’on appelle la dépendance à l’automobile.   

La dépendance à l’automobile est un phénomène de transport qui accorde la priorité aux automobiles personnelles, au détriment des modes de déplacement comme le vélo, la marche et les transports en commun. Dans une ville dépendante à l’automobile, ce sont les besoins liés aux automobiles personnelles qui dictent la conception des routes et de l’infrastructure. On peut souvent reconnaître une collectivité axée sur l’automobile à ses routes larges à plusieurs voies qui permettent une circulation rapide et à ses grands stationnements devant les bâtiments.   

Tous les autres usagers de la route, notamment les cyclistes, les piétons et les passagers des transports en commun, se retrouvent avec un financement inadéquat, et donc une infrastructure sous-développée. 

Voie cyclable obstruée et en mauvais état

Cette voie cyclable démarquée par une ligne de peinture offre peu de protection et est obstruée par une grille d’égout et la chaussée endommagée.
Fredericton (Nouveau-Brunswick)
Photo d’Adam Mahoney

Voie cyclable qui prend fin abruptement

Cette voie cyclable se termine abruptement, obligeant les cyclistes à s’intégrer de manière dangereuse dans la circulation automobile à une intersection où les points de conflit avec les véhicules automobiles sont les plus nombreux.
Rue York, Fredericton (Nouveau-Brunswick)
Photo d’Adam Mahoney

Les gens qui ne conduisent pas (pour quelque raison que ce soit) finissent par avoir l’impression que les rues de la ville sont peu sécuritaires et peu accueillantes. Résultat : environ neuf déplacements sur dix au sein de notre province se font en automobile. 

Les répercussions de notre système de transport sur le climat 

Cette statistique pose problème quand on considère que le secteur des transports au Nouveau-Brunswick contribue à 26 % des émissions globales de CO2 dans l’ensemble de la province. À l’échelle nationale, les émissions de carbone issues du secteur des transports augmentent régulièrement d’année en année. De 1991 à 2019, les émissions nationales attribuables au transport sont passées d’un peu moins de 120 mégatonnes à plus de 160 gatonnes (la pandémie a cependant causé des fermetures qui ont réduit les émissions d’environ 20 mégatonnes pendant quelques années).

Le Canada se classe au dernier rang en matière d’efficacité énergétique des véhicules, consommant en moyenne 8,9 litres d’essence aux 100 kilomètres. À l’opposé, on trouve au premier rang le Portugal, qui affiche une consommation moyenne de 4,9 litres aux 100 kilomètres. Et qui dit plus de consommation de carburant dit aussi plus d’émissions de carbone ayant une incidence sur les changements climatiques. Mais pourquoi le Canada a-t-il donc le pire rendement de carburant de la planète?   

Cette triste donnée s’explique, du moins en partie, par des achats massifs d’automobiles à passagers et de camions légers. Les émissions causées par les automobiles à passagers (berlines et voitures à hayon) sont en baisse et à leur point le plus bas en 30 ans, mais elles se font remplacer par des émissions de camions légers qui, elles, se multiplient. 

La catégorie « automobiles à passagers et camions légers » représente un large ensemble de véhicules qui inclut généralement des camionnettes et des véhicules utilitaires sport. La demande pour ces véhicules est élevée et augmente tous les ans. En 2020, 79,9 % de tous les véhicules vendus au Canada appartenaient à la catégorie des « camions légers ».   

Puisque ces véhicules sont plus gros et plus lourds, ils ont besoin de plus d’essence pour se déplacer. Les camionnettes neuves vendues par les concessionnaires en 2023 ne sont pas les mêmes qu’en 1991. Elles sont beaucoup plus imposantes, tant sur le plan de la taille que sur le plan du poids. De nos jours, un camion moyen est 32 % plus lourd (environ 1 200 livres) qu’en 1990. Par ailleurs, le camion moyen produit 31 % d’émissions de CO2 de plus  que les automobiles à passagers, ce qui se traduit par une augmentation de 156 % des émissions depuis 1991 et explique pourquoi le Canada est au deuxième rang des pires pays au monde en matière d’émissions de carbone par personne dans le secteur des transports  

Et n’oublions pas les répercussions sur la sécurité routière. Les Canadiennes et les Canadiens achètent de plus gros véhicules parce qu’ils se sentent et sont effectivement plus en sécurité en cas d’accident de la route. En revanche, toutes les personnes qui ne sont pas à bord d’un gros véhicule, notamment les piétons et les cyclistes, sont encore moins en sécurité qu’avant. Aux États-Unis ( le système de transport est semblable au nôtre), le nombre de décès de piétons a atteint son plus haut sommet en 40 ans, une statistique que beaucoup expliquent par l’augmentation de la taille des véhicules.   

Deux éléments se dégagent de notre paradigme actuel en matière de transport : premièrement, nous dépendons presque exclusivement de véhicules personnels pour la majorité de nos déplacements, et deuxièmement, ces véhicules sont beaucoup plus gros qu’avant, ce qui fait grimper les émissions de CO2.   

Solutions pour réduire la dépendance à l’automobile  

Pour réduire les émissions attribuables au transport, il faut modifier la façon dont on se rend du point A au point B.   

Évidemment, on ne propose pas d’arrêter complètement le transport automobile. Il faut plutôt trouver un équilibre entre les différents modes de transport et faire en sorte que les « autres » moyens de transport sont viables et sécuritaires. On pourrait par exemple rediriger une partie des dépenses du secteur automobile vers l’infrastructure cycliste, en investissant par exemple dans des voies cyclables protégées ou dans les transports en commun, tant à l’intérieur des villes que pour les transports interrégionaux  

Une voie cyclable large et dégagée

Une voie entièrement distincte, dégagée et large qui élimine toute interaction possible avec les véhicules automobiles.
Fredericton (Nouveau-Brunswick)
Photo d’Adam Mahoney

Il y a beaucoup d’avantages à améliorer l’accès à de multiples options de transport. D’abord, chaque personne qui prend l’autobus ou son vélo est une personne de moins qui contribue à la circulation automobile. Les voies cyclables et les transports en commun transportent un grand nombre de personnes de manière plus efficace que les véhicules personnels. Prenant l’espace d’environ 3 voitures, un autobus de transport en commun peut déplacer jusqu’à 76 personnes, alors que l’occupation moyenne d’une voiture n’est que de 1,7 personne (maximum 5 à 7 personnes); et la majorité des voitures en circulation n’ont qu’une seule personne à bord.   

Certes, nos villes n’ont pas encore une circulation automobile comme celle de Toronto, mais nos routes deviendront de plus en plus achalandées à mesure que la population augmente et que notre système de transport continue à dépendre de l’automobile personnelle.   

Autre élément convaincant : les avantages climatiques liés à l’adoption de différents modes de transport. Les émissions de CO2 pour un véhicule personnel moyen (tous modèles confondus) au Canada sont de 206 grammes par kilomètre. Bien que les gros autobus diesel émettent beaucoup de dioxyde de carbone, si l’on tient compte des émissions par personne à bord de l’autobus, l’impact est considérablement réduit. Pour un autobus à moitié plein (35 personnes), les émissions de CO2 pour chaque personne sont d’environ 60,48 g CO2/km, 2/km, et ce chiffre diminue en fonction du nombre de personnes dans l’autobusou si ce dernier est électrique! 

Un autobus électrique à côté de vélos de location

Rappelonsle : les véhicules électriques peuvent avoir une incidence importante sur la réduction des émissions de carbone, non seulement quand il s’agit de véhicules personnels, mais aussi quand ce sont des véhicules de transport en commun! Les émissions de CO2 des véhicules électriques sont nettement inférieures à celles des véhicules à essence et continueront de s’améliorer à mesure que le réseau électrique se dirige vers une élimination complète du carbone.   

Le vélo, lui, est encore plus avantageux, car il ne produit pas d’émissions d’échappement, et les émissions liées à sa fabrication sont relativement faibles. La seule chose qui fera augmenter votre empreinte carbone sera la nourriture que vous mangez! De surcroît, la popularité des vélos électriques a considérablement élargi l’offre et réduit les obstacles à la participation pour les personnes qui s’intéressent au transport actif. Enfin, le vélo (qu’il soit traditionnel ou électrique) est un moyen de transport sain et amusant! 

@thegaiaproject_

Have you seen a more beautiful commute? Anna-Lee rode the Gaia Project e-bike from our HQ is downtown Fredericton to Nashwaaksis Bridge – that’s an 88km commute roundtrip! #LowCarbonTransportation #BikeTok #BikToWork E-Bike #ElectricVehicle . Aller travailler en toute beauté! Anna-Lee a pris le vélo électrique du Projet Gaia et s’est rendue de notre bureau, au centre-ville de Fredericton, jusqu’au pont de Nashwaaksis, soit 88 km aller-retour! #Transports #FaibleEmpreinteCarbone #VéloTok #AuBoulotÀVélo #VéloÉlectrique #VéhiculeÉlectrique

♬ Would That I (True that I saw her hair like the branch of a tree) – Hozier

Anna-Lee du Projet Gaia nous montre son trajet du travail à la maison avec le vélo électrique de l’équipe! 

Si j’avais eu accès à des infrastructures de transport actif sécuritaires pendant mon enfance, je pense que j’aurais moins ressenti l’urgence d’obtenir un permis de conduire à l’adolescence. Les villes qui se dotent d’infrastructures cyclables sécuritaires et intégrées enregistrent une augmentation corrélative du nombre de personnes qui les utilisent.   

Nous devons repenser notre manière de voir le transport au Nouveau-Brunswick. Un système de transport plus durable serait avantageux pour tout le monde. La diminution du nombre de conducteurs permettrait de réduire les émissions de CO2 à l’échelle provinciale, d’améliorer la qualité de l’air, de décongestionner les routes et de faire de celles-ci un espace plus sécuritaire pour tous les usagers. Il n’existe pas de solution miracle en ce qui concerne le transport : chaque mode peut s’intégrer dans un système de rues plus sécuritaires et plus durables si on lui accorde l’espace nécessaire. 

Le nouveau programme du Projet Gaia, Écomobilité en actions, enseigne aux jeunes du secondaire comment nos déplacements quotidiens contribuent aux changements climatiques. Les élèves apprendront comment notre système de transport favorise les modes de déplacement qui émettent du carbone et comment nous pouvons faire des choix plus durables à l’avenir. Inscrivez-vous à une présentation en classe du Projet Gaia et à des activités guidées pour aider vos élèves à explorer les transports durables! 

Références

1. Hanson, R. Trevor, Allaire, Florence; MacEacheron, Carly. “Issues and Opportunities for Ehancing Active Transportation Among Rural and Urban Areas: Lessons from a New Brunswick Study,” UNB Department of Civil Engineering. October 2015. https://ctrf.ca/wp-content/uploads/2015/05/CTRF2015HansonAllaireMacEacheronTransportationPolicyPlanning.pdf  

2. “Provincial and Territorial Energy Profiles – New Brunswick,” Canada Energy Regulator.Consulted on August 14, 2023. https://www.cer-rec.gc.ca/en/data-analysis/energy-markets/provincial-territorial-energy-profiles/provincial-territorial-energy-profiles-new-brunswick.html#:~:text=New%20Brunswick’s%20emissions%20per%20capita,23%25%20(Figure%207).  

3. Environment and Climate Change Canada (2023) Canadian Environmental Sustainability Indicators: Greenhouse gas emissions. Consulted on August 14, 2023. https://www.canada.ca/en/environment-climate-change/services/environmental -indicators/greenhouse-gas-emissions.html#transport  

4. “Market Snapshot: How does Canada rank in terms of vehicle fuel economy?” Canada Energy Regulator, 31 July. 2019. https://www.cer-rec.gc.ca/en/data-analysis/energy -markets/market-snapshots/2019/market-snapshot-how-does-canada-rank-in-terms -vehicle-fuel-economy.html 

5. “The Rise of Light-Duty Trucks in Canada: Reversing the Trend,” Equiterre, 30 March. 2021. https://www.equiterre.org/en/articles/news-the-rise-of-light-duty-trucks-in-canada -reversing-the-trend 

6. Tiseo, Ian. “Road transportation carbon dioxide emissions per capita worldwide in 2018, by select country,” Statista, July. 2020. https://www.statista.com/statistics/1201243/road -transport-sector-per-capita-co2-emissions-worldwide-by-country/ 

7. Chase, Will., Muller, Joann., Whalen, Jared. “How pickup trucks became so imposing,” Axios, 23 Jan. 2023. https://www.axios.com/2023/01/23/pickup-trucks-f150-size-weight-safety 

8. Long, Zoe and Axsen, Jonn. “The rising Canadian Obsession with SUVs is disrupting out climate goals,” The Conversation, 19 Jan. 2023. https://theconversation.com/the-rising -canadian-obsession-with-suvs-is-disrupting-our-climate-goals-192822 

9. Kim, Juliana. “U.S. pedestrian deaths reach a 40-year high,” NPR, 26 June. 2023. https://www.npr.org/2023/06/26/1184034017/us-pedestrian-deaths-high-traffic-car  

10. Anderson, L. Michael and Auffhammer, Maximilian. “Pounds That Kill: The External Costs of Vehicle Weight,” The Review of Economic Studies, Volume 81, Issue 2, April 2014, Pages 535-571, https://academic.oup.com/restud/article-abstract/81/2/535/1517632? redirectedFrom=fulltext&login=false 

11. Saxifrage, Barry. “Canadian cars are the world’s dirtiest,” National Observer, 4 Sept. 2019. https://www.nationalobserver.com/2019/09/04/analysis/canadian-cars-are-worlds -dirtiest-ev-age-essential 

12. Mitra, Raktim., Khachatryan, Avet., Hess, M. Paul. “Do new urban and suburban cycling facilities encourage more bicycling?” Transportation Research Part D: Transport and Environment, Volume 97, August 2021. Pages 1-10. https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1361920921002145  

13. Newcombe, Daryl. “Critics say London, Ont.’s bike lanes are underutilized and seasonal – but here’s the ridership data.” CTV News, 26 May 2023. https://london.ctvnews.ca/critics -say-london-ont-s-bike-lanes-are-under-utilized-and-seasonal-but-here-s-the-ridership -data-1.6415256  

 

Auteur : Adam Mahony, coordonnateur de programmes, Projet Gaia 

  • The Gaia Project is a wonderful resource that I have been using for many years. They have such a great staff and are truly the most helpful educational resource that I have used in my teaching career.

    Brent Anderson

    enseignant

  • J’avais déjà des idées pour aider l’environnement, mais l’atelier a vraiment ouvert mes horizons et m’a donné encore plus de motivation et de soutien.

    Élève

    École Harbour View High School

  • Être bénévole pour le programme des experts verts, c’est une façon très gratifiante de représenter la communauté des écologistes, surtout quand on peut interagir avec des jeunes qui s’intéressent à ces débouchés.

    Alyse Wilton

    Poumon NB

  • Le programme du Projet Gaia sur les énergies renouvelables pour les élèves de 6e année est vraiment exceptionnel. Il est à la fois amusant, accrocheur et réellement éducatif, une combinaison qui interpelle profondément les jeunes élèves.

    Krista McGinn

    enseignante

  • Les jeunes d’aujourd’hui sont les dirigeants, les innovateurs, les scientifiques, les entrepreneurs et les décideurs de demain. Le Projet Gaia est un organisme unique qui aide les élèves à comprendre cette menace existentielle et à y réagir, aujourd’hui comme à l’avenir.

    John Reid

    bénévole

  • Les programmes du Projet Gaia ont permis d'apporter de réels impacts, non seulement dans la compréhension et la vision qu’ont les élèves du monde qui les entoure et dans leur capacité à aider, mais aussi dans la manière dont l’école est gérée, car nous avons apporté des changements concrets à certaines de nos stratégies et pratiques de consommation d’électricité.

    Brent Rowney

    enseignant à l’école Oromocto High School

  • Les jeunes ont un rôle à jouer dans la protection de notre climat, aujourd’hui et demain, et c’est pourquoi nous sommes heureux d'appuyer le Projet Gaia dans sa mission d'outiller les jeunes.

    Krista Han

    associée directrice - Grant Thornton LLP Nouveau-Brunswick

  • Merci, j’ai raconté à mes parents ce que nous avons fait en classe et maintenant ils ont envie de faire du recyclage à la maison !

    Olivia

    élève de l’école Parkwood Heights Elementary